Assurance vie et Seniors : jouer les abattements

Même après 70 ans, la fiscalité de l’assurance reste attractive. Il est faux de prétendre, d’un strict point de vue successoral, que l’assurance-vie est moins intéressante pour les souscripteurs âgés.

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Le régime fiscal applicable aux capitaux versés lors de la succession dépend de la date de souscription du contrat d’assurance-vie et des versements. Avec une bonne maîtrise de la fiscalité, on peut optimiser la transmission de son patrimoine.

Deux régimes fiscaux à différencier

Au moment de la succession de l’assuré, les versements effectués depuis le 13 octobre 1998 sur un contrat d’assurance-vie sont soumis à un prélèvement de 20 % au-delà de 152 500 € par bénéficiaire.

Parallèlement, les versements d’un assuré de 70 ans ou plus ne sont exonérés de droits de succession qu’à hauteur de 30 500 € pour tous les contrats souscrits depuis le 20 novembre 1991. Ils ne sont donc pas concernés par le prélèvement de 20 %.

À noter = Des règles spéciales s’appliquent pour les versements après 70 ans ou les capitaux supérieurs à 152 500€.

> Avant novembre 1991

Pour les contrats souscrits avant le 20 novembre 1991, la règle diffère selon la date des versements :

  • les primes versées avant le 13 octobre 1998 restent exonérées de droits de succession, à condition que le contrat n’ait pas subi de modification essentielle après le 20 novembre 1991. Dans le cas contraire, le fisc peut considérer qu’il s’agit d’un nouveau contrat et le soumettre à la règle « des 70 ans » (droits de succession pour les primes qui excèdent 30 500 €).

La modification essentielle s’entend d’une nouvelle clause qui transforme l’économie du contrat. II en est ainsi, notamment, du passage d’un contrat à prime unique en contrat à primes multiples, ou encore en cas de versements dis proportionnés par rapport aux précédents ;

  • les primes versées à compter du 13 octobre 1998 sont soumises au nouveau prélèvement de 20 % au-delà de 152 500€, quel que soit l’âge de l’assuré au moment des versements.

Bon à savoir : S’il existe plusieurs contrats pour un même bénéficiaire, la limite de 152 500€ s’applique tous contrats confondus.

> Depuis novembre 1991

La fiscalité des contrats souscrits depuis le 20 novembre 1991 dépend également des dates de versements :

  • Les primes versées avant le 13 octobre 1998 restent exonérées de droits de succession si les versements ont eu lieu avant les 70 ans de l’assuré. Après cette date anniversaire, les nouvelles primes seront soumises aux droits pour la fraction qui excède 30 500 €.
  • Les primes versées depuis le 13 octobre 1998 sont (exonérées jusqu’à 152 500 € pour les versements effectués avant le soixante-dixième anniversaire de l’assuré. Au-delà de ce montant, elles subissent le prélèvement de 20 %. Les versements qui interviennent après 70 ans sont soumis aux droits pour la fraction excédant 30 500 €.

Bon à savoir : Le prélèvement de 20% ne s’applique pas aux contrats de rente-survie et d’épargne-handicap.

Optimiser et cumuler les abattements

L’assuré de plus de 70 ans dispose de deux contrats : l’un souscrit avant et l’autre après le 20 novembre 1991.

II a intérêt, fiscalement, à alimenter en priorité le premier. II peut ainsi y déposer jusqu’à 152 500€ par bénéficiaire en franchise totale de droits de succession. Au-delà de ce montant, les primes seront soumises au prélèvement de 20 %.

Sur le second contrat, toutes les primes versées au-delà de 30 500 € seront soumises aux droits de succession, mais les produits de ces versements seront totalement exonérés.

Si le conjoint est le bénéficiaire de l’assurance, il pourra cumuler les deux abattements.

Exemple

S’il reçoit 60 000 € au titre de la succession et 46 500 € au titre de l’assurance-vie, il ne paiera, compte tenu de l’abattement spécifique de 76 000 € accordé au conjoint survivant depuis le 1er janvier 2002, aucun droit en tant qu’héritier et il lui restera un reliquat d’abattement sur la succession de 16 000 € (76 000 € — 60 000 €).

En tant que bénéficiaire du contrat, seule la partie excédant 30 500 € (soit 46 500 € — 30 500 = 16 000 €) supportera une taxation. Mais il sera possible d’imputer le reliquat d’abattement de 16000€.

Au final, le conjoint survivant ne paiera aucun droit au titre de l’assurance-vie.

Assurance-vie et fiscalité lors de la succession

Date de souscription du contrat

Primes versées avant le 13 octobre 1998

Primes versées à partir du 13 octobre 1998

Avant le 20 novembre 1991 Pas de taxation (sauf modification de l’économie du contrat) Prélèvement de 20 % sur la fraction du capital décès > 152 500 € (1)
À compter du 20 novembre 1991 :
  • Primes versées avant les 70 ans de l’assuré
Pas de taxation Prélèvement de 20 % sur la fraction de capital décès > 152 500  €
  • Primes versées avant les 70 ans de l’assuré
Droits de mutation selon le degré de parenté sur la fraction des primes > 30 500 € (1) Droits de mutation selon le degré de parenté sur la fraction des primes > 30 500 € (1)

(1) Les intérêts capitalisés sont toujours exonérés des droits de mutation par décès (rép. min., JOAN du 18 février 2002, p. 926).

Source Tableau : Cieleden

Exemples :

À  70 ans, M. X investit 90 000€ dans un contrat multisupport. Avec une espérance de vie de treize ans, il pourra se retrouver à la tête de 180 000 €. Son bénéficiaire ne sera imposé que sur 59 500 € (90 000 € de primes — 30 500 € d’abattement).

A 68 ans, M. Y verse une prime de 122 000€ et désigne comme unique bénéficiaire son fils. A son décès, le capital valorisé s’élève à 175 300€. Son fils percevra : 152 500 € + (22 800 € — 4 573 €) = 170 727 € (152 500 au titre de l’abattement, 18 227 après abattement de 20 % sur 22 800 €).

L’assurance vie dans la stratégie familiale

L’assurance-vie permet de doter son conjoint, un enfant ou un petit-enfant. II suffit juste de savoir prendre quelques précautions avec le droit successoral.

Assurance-vie et mariage

L’assurance-vie ne fait pas partie de la succession même si des arrêts récents ont requalifié certains contrats en capitalisation (voir « fiches pratiques »). En revanche, lorsque les primes versées par l’assuré sont manifestement exagérées, elles risquent d’être réintégrées dans la succession.

À qui appartient le contrat ?

Pour éviter que la moitié du contrat d’assurance-vie souscrit par un époux commun en biens avec son conjoint ne tombe, à son décès, dans la masse successorale, les notaires proposent deux solutions :

  • Souscrire en adhésion conjointe : le dénouement interviendra alors au choix, au premier ou au second décès. Inconvénient : si des versements sont effectués par l’un des conjoints qui a plus de 70 ans (et que l’autre ne les a pas encore), la règle fiscale dépendra de l’ordre des décès: la taxation des primes après abattement de 30 00 € s’appliquera sur la totalité des sommes versées.
  • Prévoir une clause d’attribution du contrat en faveur du conjoint (préciput) : celle-ci échappe aux règles successorales. Avantage : quel que soit l’ordre des décès, le contrat reste acquis au survivant, soit en application de la clause bénéficiaire, soit parce qu’il n’est pas dénoué.

Héritier et bénéficiaire

Même si cela n’a rien de choquant à première vue, les choses se compliquent à l’excès lorsqu’il s’agit d’appliquer les règles du droit successoral et du droit fiscal. L’impôt n’en sera pas le même selon la date de souscription du contrat et l’âge du souscripteur au moment du versement des primes.

Coupler une donation et une assurance-vie

Il peut être également intéressant de combiner les avantages fiscaux de la donation et ceux de l’assurance-vie lorsqu’on souhaite donner de son vivant une somme d’argent importante à un enfant ou à un petit-enfant. Un parent peut ainsi donner, en franchise fiscale, jusqu’à 46 000 € à chacun de ses enfants tous les dix ans et jusqu’à 15 000 € chaque petit-enfant, à condition de se limiter à la quotité disponible car les petits-enfants ne sont pas des héritiers directs du vivant de leurs parents.

Les versements seront réalisés sous la forme d’une donation prévoyant le remploi des sommes sur un contrat d’assurance-vie dont le souscripteur-assuré est l’enfant. Pendant toute sa minorité, ce sont ses administrateurs légaux (en principe, ses parents) qui géreront le contrat.

Des verrous de sécurité peuvent accompagner l’opération : par exemple, une clause d’inaliénabilité permet de fixer l’âge auquel l’enfant majeur pourra entamer le capital ou une clause de retour conventionnel permet, en cas de décès du donataire, de faire revenir les biens donnés dans le patrimoine du donateur.

PACS et assurance vie

Tout placement réalisé après la signature d’un Pacs est présumé indivis (c. civ. art. 515-5). Un contrat d’assurance-vie souscrit par l’un des partenaires sera donc réputé être alimenté à parts égales par chacun des concubins pacsés. Au décès de l’assuré, le bénéficiaire se trouvera dans la situation du conjoint survivant : il recevra un capital, mais pourrait, en cas de rupture avec son partenaire, lui en devoir la moitié, sauf à avoir spécifié, lors de la souscription du contrat, que l’épargne investie lui était propre.

Par ailleurs, le code des assurances ne fait pas allusion « aux pacsés » mais « aux époux » : en cas de contestation, il n’est pas certain que les juges procéderont par assimilation.

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